Cet article revient sur les fondements théoriques de l’écriture d’un roman de recherche dans le champ des études urbaines. Par cette réflexion sur l’esthétique de la recherche, il s’agissait, pour l’auteure, d’inventer une forme pour déployer des hypothèses et des interprétations des situations observées. Cette expérience s’inscrit dans un double mouvement, centré sur l’enquête, par lequel des pratiques d’écriture d’écrivaines et de chercheuses en sciences sociales se rapprochent, aux franges des sciences, de la poésie et de l’art contemporain. En quoi ce tournant esthétique des sciences sociales est-il le signe d’un épuisement des chercheuses face aux contraintes des écritures (et du travail) académiques dont l’internationalisation et l’intensification conduisent à un formatage au détriment d’une herméneutique de la pensée ? Dans une première partie, l’article reviendra sur l’histoire de la disciplinarisation de l’écriture en sciences sociales. Une seconde partie s’attachera à rappeler le pouvoir heuristique de la fiction. Dans un troisième temps, j’explorerai des pistes formelles d’agencement des formes et de composition des points de vue comme invitation à de nouvelles esthétiques de la recherche.