Depuis une vingtaine d'années, l'aéroport s'est imposé comme l'une des figures récurrentes des essais sur la ville contemporaine. «Non-lieu», «ville générique», «espace des flux», edge city 1 : il occupe souvent un rôle délicat d'exemplarité, illustratif ou repoussoir, incarnant la figure d'une extériorité urbaine. Son développement soulève aujourd'hui des questions essentielles sur le contenu, l'intérêt et les limites d'un urbanisme de flux intimement lié aux logiques de mondialisation. Vecteur de nombreuses anticipations-dont se nourrissent régulièrement les films de science-fiction 2-, la figure de l'aéroport comme leçon critique, procède sans doute du fait qu'il semble incarner à lui seul le récit de la globalisation, de ses dépassements et de ses peurs, et de la façon dont elle interagit avec les villes. Elle peut aussi s'expliquer par le fait que nos représentations portent autant, sinon plus, sur l'imaginaire prolifique qui projette ces lieux, que sur leur matérialité apparente 3. Autrement dit, si l'aéroport réel est souvent perçu comme objet fantasmé et insaisissable, fascinant et terrifiant, n'est-ce pas aussi parce qu'il s'est toujours construit comme le lieu contemporain de nos attentes les plus contradictoires? Faire l'histoire d'un espace hypermoderne?